Concrétisation de l’abattage à la ferme : bilan fin 2018

Nature & Progrès et le groupe multi-acteurs (éleveurs, citoyens et chercheurs) pour l’abattage à la ferme ont réalisé cette année différent avancements pour la concrétisation de l’abattage à la ferme en Wallonie :

  • Éclaircissement de la situation légale notamment en Allemagne où le tir au pré est autorisé sous conditions
  • Rencontre de différents experts pour définir un protocole d’abattage à la ferme permettant de garantir le bien-être animal et la sécurité sanitaire
  • Sondage auprès des éleveurs pour mieux identifier et quantifier les besoins pour l’abattage à la ferme (fréquence, nombres…) et motivations

A la suite de la présentation de ces derniers résultats au Salon bio Valériane (télécharger le rapport le version PDF), une conférence de presse a été organisée afin de rendre public le fruit de ces recherches. Neuf retours presse (TV, radio, presse écrite) ont permis de faire connaître le dossier, fin septembre 2018.

Une rencontre des Ministres wallon et fédéral de l’agriculture a été sollicitée. Leurs cabinets respectifs nous ont reçu début novembre. L’intérêt de l’abattage à la ferme pour notre agriculture est clairement reconnu par nos politiques. Une discussion a eu lieu sur les obstacles et solutions pour concrétiser le tir en enclos ou le camion d’abattage mobile en Belgique / Wallonie.

Voici les conclusions de ces rencontres et perspectives pour le dossier.

Tir en enclos

Evolution réglementaire

La mise en œuvre du tir en enclos nécessite une modification du Règlement 853/2004 fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale. Ce règlement prévoit, en son Annexe III, Section II, Chapitre IV, point 2 a) : « Seuls les animaux vivants destinés à l’abattage peuvent être introduits dans les locaux d’abattage, exception faite des animaux ayant fait l’objet d’un abattage d’urgence, des animaux abattus sur le lieu de production et du gibier sauvage ». Les animaux abattus sur le lieu de production sont définis dans le même règlement, Annexe III, Section II. Il s’agit du « gibier d’élevage », catégorie reprenant les ongulés à nombre de doigts pair (cervidés et suidés), les ratites (oiseaux coureurs) et les bisons. Le gibier d’élevage peut être abattu sur le lieu d’exploitation, notamment si « les animaux ne peuvent être transportés pour éviter tout risque pour le manipulateur ou garantir le bien-être des animaux » (point 3-a).

Nous souhaitons que la Belgique rencontre la Commission européenne en vue de demander l’introduction de certaines races bovines (Highland, Galloway, Salers…) dans la catégorie « gibier d’élevage » en raison de leur tempérament « sauvage », lié à la race et au mode d’élevage (bêtes à l’extérieur toute l’année, en pâturage très extensif, quasi-absence de contacts avec l’homme). Cette demande peut être justifiée étant donné que la manipulation de ces races présente des risques pour le personnel d’abattage. Par ailleurs, en Wallonie, l’abattage des Highlands a généralement lieu sur le parking des abattoirs et non dans la chambre d’étourdissement. Le transport de ces animaux non-habitués à la claustration pose des problèmes de bien-être animal, portant préjudice, comme des études le démontrent, aux qualités organoleptiques de la viande. La plupart de ces races étant élevées en Wallonie et en progression constante, nous comptons sur un soutien politique pour l’obtention d’une modification du Règlement en vue de raccrocher ces races bovines rustiques à la catégorie du « gibier d’élevage », où se trouve déjà une autre espèce de bovidés (le bison).

Etudes pilotes

En vue d’encourager une adaptation à terme du Règlement 853/2004 pour cadrer l’abattage à la ferme des autres animaux de rente domestiques, des éleveurs souhaitent mettre en place des études-pilotes, en partenariat avec la Faculté de Médecine Vétérinaire de l’Université de Liège. Ces études permettraient de récolter des données permettant d’affiner le protocole d’abattage à la ferme (notamment les modalités de transport de la dépouille vers un abattoir : chronométrage, conditions de température, etc.) et d’offrir les garanties nécessaires à une acceptation de ces pratiques par l’Europe. Un groupe d’éleveurs de la région germanophone ainsi que la coopérative VBHA (viande biologique des herbages ardennais) nous ont déjà informés de leur intérêt pour ce type d’étude, pour laquelle un soutien serait nécessaire : appui à la demande, auprès de la Commission européenne, d’une dérogation circonstanciée aux fins de l’étude, et soutien financier.

Camion d’abattage

Le camion d’abattage mobile est une solution présentant beaucoup de potentiel pour la Wallonie. Sur le lieu d’élevage ou accolé à un atelier de découpe, il permettrait de renforcer les lieux d’abattage en Wallonie en se concentrant notamment sur les régions les moins desservies. La faisabilité technique étant acquise grâce aux outils existants en Allemagne, en Suède et en France, il reste la question du financement de ce camion. Afin de garantir l’accessibilité de cet outil à tous les éleveurs ainsi qu’aux particuliers, nous pensons que le camion devrait être porté par un acteur public (région, provinces ?), éventuellement en partenariat avec une structure privée (abattoir / atelier de découpe / boucher).

Nous sollicitons une aide publique pour l’investissement dans l’infrastructure d’abattage (estimée à environ 800.000 euros), à travers les mesures d’aides à l’investissement destinées aux abattoirs publics (définie dans l’arrêté régional du 06/03/1986 à 40 % de l’investissement soit 320.000 euros) et de la mesure hall-relais agricole (200.000 euros). Une adaptation réglementaire est néanmoins nécessaire afin d’ouvrir ces outils de financement, réservés à des structures fixes, au camion mobile d’abattage. Si ces deux sources de financement sont activées, elles permettraient de libérer 520.000 euros pour la création du camion d’abattage, soit de financer 65 % de l’investissement. Des aides nationales ou provinciales, l’intervention d’une structure privée et/ou d’une coopérative d’éleveurs pourraient prendre en charge le montant restant.

Le fonctionnement du camion mobile d’abattage doit être financièrement autoportant. Afin de chiffrer les coûts de fonctionnement (salaires, transport, ressources, frais d’analyses, cotisations, autorisations, assurances…) et d’estimer les scénarii permettant une efficience économique de l’outil, une étude économique est nécessaire. Nous demandons que la mission et les moyens soient donnés à une structure pour mener à bien cette étude indispensable pour une concrétisation du camion d’abattage.

Et maintenant…

Affiner les coûts de fonctionnement et rentrées financières du camion d’abattage

Rita, étudiante agronome, va réaliser chez Nature & Progrès un stage et un travail de fin d’études sur les possibilités de rentabilité économique du camion d’abattage, notamment en contactant toutes les boucheries à la ferme de Wallonie pour s’enquérir de leurs besoins d’abattage. Les boucheries à la ferme combinent les avantages de nécessiter des abattages réguliers (généralement hebdomadaires) et « relativement » importants (en nombre de bêtes) pour le circuit court (par rapport aux colis de viande). La faisabilité économique du camion sera évaluée pour ce type de clientèle, puis pour la clientèle « colis » et pour un cas optimal de fonctionnement du camion. C’est sans doute une combinaison de ces trois scénarii qui permettra un équilibre économique du camion.

Affaire à suivre !

A vos réactions

N’hésitez pas à commenter ce post ou à nous contacter (sylvie.laspina at natpro.be).

Rendez-vous le jeudi 20/12 à Nismes pour une conférence sur le sujet où nous pourrons également en débattre (infos ici).


 

Qu'en pensez-vous ?

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s